Genre : Psych Stoner
Pays : Italie
Label : Go Down Records
Date de sortie : 10.11.2023
Je n’ai de cesse de le dire, mais l’Italie est peut-être le pays qui m’impressionne le plus par la qualité et la versatilité de sa scène malgré sa relative discrétion… Avec la France, bien entendu. Les deux pays comptent de nombreux artistes méconnus, œuvrant dans tous les genres possibles et souvent avec beaucoup de talent. Je ne connaissais pas Humulus, mais je savais que je pouvais foncer les yeux fermés vers du psych stoner italien, ayant été charmé par d’autres projets analogues œuvrant dans le post-rock et le progressif, pour des ambiances léchées et oniriques. Alors comme d’habitude, je vous invite à sortir votre casque et prévoir une bonne heure de votre temps pour vous laisser pleinement happer dans un nouveau voyage basculant les sens. C’est parti !
Attention toutefois. Nous ne sommes pas dans une ambiance purement cosmique et planante. Les influences Space Rock du groupe sont bien présentes, en atteste ce chant caverneux et cryptique, autant que le groove de chacun des titres. "Black Water" en atteste, avec ses paroles mystérieuses et sa musique génératrice d’images impossibles. Ces immenses lacs obscurs paraissant paisibles au rythme choisi par le trio. Le pont est long, le pont est bon. "Secret Room" est plus explosif, et démarre au quart de tour avec une guitare plus incisive. Elle est plutôt répétitive et hypnotique, jusqu’à la seconde moitié du titre, où elle devient plus bondissante… avant l’accalmie, dans un schéma plutôt similaire au morceau précédent. Cela devient alors minimaliste, presque comme pour planter le décor d’une scène paisible, à l’atmosphère tranquille. Le groupe est parfois plus pêchu, mais jamais agressif, même lorsque la guitare vient flexer sa disto pour des breaks alléchants. Peut-être la plus grande force de cet album, au nom plus macabre que ses sonorités : tout est toujours doux et facile d’approche, rendant l’écoute tout simplement très agréable, même d’une oreille distraite. "Shimmer Haze", qui poursuit, s’octroie même le luxe d’avoir deux passages du genre, où les instruments prennent bien le temps de se déployer et d’afficher ce qu’ils ont dans le bide. Toujours avec un certain minimalisme, comme pour mieux nous forcer à être concentré sur ce qui nous est exposé. Sympa, jamais simpliste ou ennuyeux malgré ces longueurs et ces formules plutôt classiques… On soulignera encore l’intro délicieusement 70s de "Buried By Tree", que l’on aurait aimé presque plus longue, pour une approche peut-être moins strictement planante et un peu plus prog à l’ancienne. Pas une critique… Juste un souhait personnel pour casser un peu la routine ! Mais le titre reste plutôt délicieux, avec ENCORE un pont aux petits oignons, allant cette fois crescendo pour un… retour aux riffs du début ? Surprenant, et un peu décevant tant on aurait aimé un feu d’artifice ! Mais encore une fois… du chipotage. Un peu moins pour la fin, clairement plate.
"7th Sun" est le deuxième morceau le plus long de l’album, et à ce titre… Il s’offre une intro bien allongée, lorgnant presque vers la minimale, avant de timidement rajouter les cordes au bout d’une minute. Puis tout aussi doucement la batterie… Avant de donner le top départ, toujours en souplesse. Il faut encore attendre une minute entière avant que les paroles n’apparaissent, contant une histoire de voyage spatial sous forme de quête intérieure. On ne réinvente pas la roue… Mais ça marche quand même tellement bien avec le mood psych/stoner, à chaque fois ! Le pont est cette fois surprenant, ayant des touches apparaissant presque de l’ordre du… shoegaze ? Les boucles sont également plus cools encore qu’à l’accoutumée, sans pouvoir réellement expliciter pourquoi… Simplement une rythmique qui fait sacrément plaisir et donne la patate ! Du même tonneau, citons le très lumineux et plutôt véloce "Flowers of Death". On croirait presque entendre du "Sonic Flower" ! A croire qu’il y a quelque chose intrinsèquement contenu dans le mot "flower"… Et c’est d’autant plus étonnant que le groupe ait nommé son album d’après ce titre, tant il détonne avec le reste, beaucoup plus calme et progressif (on n’atteint "même pas" les quatre minutes ici !) Avec cette empreinte fuzz rock, c’est sans doute le titre le plus "mainstream" de la galette, mais cela ne signifie en rien qu’il est banal ou hors de propos. En fait, il apporte plutôt une touche de fraîcheur très appréciable !
Le dernier titre est exactement comme on l’imagine… Excessivement long, jusque dans son titre : "Operating Manual For Spaceship Earth". Généreux avec de multiples changements de rythmiques et d’ambiances. Une véritable épopée à part entière, où le groupe affiche toutes ses tripes sans retenue. Et si déjà les autres titres étaient parcimonieux en termes de chant, la longueur de cet ultime titre les rend pratiquement anecdotique. On se laisse happer par le son… et sa répétition, qui nous submerge de ses effets toujours très à propos.
En bref, on regrettera tout juste un peu plus de piquant par moment. Mais c’est un bien petit défaut face à la constance et la force évocatrice des sept morceaux de Humulus. Jamais morne, ni rentre-dedans pour autant, il offre surtout un voyage généreux où il vaut mieux s’installer confortablement pour en profiter sans risque de remous.